Extravagance feuilletonesque et volonté littéraire dans La Vampire de Paul Féval
2015; University of North Carolina Press; Volume: 55; Issue: 1 Linguagem: Francês
10.1353/rmc.2015.0009
ISSN2165-7599
Autores Tópico(s)Literary Analysis and Cultural Studies
ResumoExtravagance feuilletonesque et volonté littéraire dans La Vampire de Paul Féval Gerald Prince Si Le Bossu, avec son immortel “Si tu ne viens pas à Lagardère, Lagardère ira [t] à toi,” est l’œuvre la plus célèbre de Paul Féval, qui écrivit plus de soixante-dix romans, près de soixante-dix nouvelles, au moins une trentaine de pièces de théâtre, d’études historiques, de brochures chrétiennes, de pamphlets, et qui aborda, comme on dit, tous les genres, depuis le roman social, le roman de mœurs et le récit fantastique jusqu’au roman d’aventures criminelles (Les Habits noirs, par exemple, dont l’adaptation pour le petit écran connut un grand succès), au roman policier (Jean Diable parut en 1862 et Gaboriau fut le secrétaire de notre héros) et à la monographie catholico-historique – Les Merveilles du Mont-Saint-Michel, que l’abbé Louis Bethléem qualifie de “magnifique” dans son Romans à lire et romans à proscrire (246) – La Vampire est peut-être son roman le plus intéressant.1 Paul Féval développa le thème du vampire dans trois romans très différents: un pastiche d’Ann Radcliffe, La Ville-vampire (1874), dans lequel la fameuse romancière, qui pourchasse un vampire, arrive dans une grande ville éponyme où résident une multitude de suceurs de sang; un ouvrage parodique intitulé Le Chevalier Ténèbre (1860), où sont racontées les aventures de deux frères et vampires; enfin, le texte historico-fantastique qui me sollicite et qui est sans doute le tout premier roman de vampires, puisqu’il parut en 1856, plus de quarante ans avant le Dracula de Bram Stoker. Publié pour la première fois avec La Chambre des amours dans Les Drames de la mort, un ouvrage contenant ces deux romans vaguement reliés (ils ont en commun un personnage important, Gâteloup) et inédits, il faut le [End Page 43] noter, en périodiques, La Vampire relate comment la comtesse Addhéma traque, à Paris, les jeunes gens et les jeunes filles afin de leur prendre la vie et de voler leur fortune. Elle remet celle-ci au comte Szandor, qu’elle aime mais qui ne songe qu’à dépenser toutes ces richesses avec les belles de Prague ou de Vienne. Pour réaliser ses desseins, Addhéma participe à la conspiration de Cadoudal contre Bonaparte mais elle dénonce le comploteur à la police afin d’obtenir un passeport pour Vienne et de ne rien laisser derrière elle.2 De plus, pour mieux égarer les soupçons, elle répand la fable de la Vampire et elle fait jeter dans la Seine des cadavres enlevés à la morgue.3 A ces dimensions historico-mélodramatiques, Féval ajoute celle du surnaturel. Un livre intitulé La Légende de la goule Addhéma et du vampire Szandor ne fut-il pas “imprim[é] à Bade, en 1736, par le professeur Hans Spurzheim, docteur de l’université de Presbourg” (204)? Comme le dit Jean-Pierre Galvan (136), entre l’intrigue criminelle et politique, d’un côté, et l’intrigue où la comtesse et le comte sont réellement des vampires, de l’autre, Féval ne tranche pas, le roman menant à deux dénouements: le premier souligne que la protagoniste – éliminée par une des proies qu’elle a su séduire, René (le bien-nommé) de Kervoz4 – a exploité la tradition vampirique pour dissimuler ses crimes; le deuxième confirme le caractère surnaturel d’Addhéma, qui exécute l’infidèle Szandor avant de se tuer elle-même. Tout comme Le Bossu, La Vampire n’est certainement pas sans défauts ou sans bosses. Si le style en est rarement incorrect, il ne va pas sans périphrases ampoulées, précisions irrésistiblement expansives, énoncés à rallonges et grandiloquence: “Il y avait là, sous le quai de Béthune, dit par exemple le narrateur, des poètes déclassés, des inventeurs vaincus, d’anciens don Juan, banqueroutiers de l’industrie d’amour qui s’étaient cassé bras et jambes en voulant grimper à l’échelle...
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