L’Ève future et la série culturelle des « machines parlantes ». Le statut singulier de la voix humaine au sein d’un dispositif audiovisuel
2007; Volume: 17; Issue: 1 Linguagem: Francês
10.7202/016321ar
ISSN1705-6500
Autores Tópico(s)Historical and Literary Analyses
ResumoL’Ève future , oeuvre profondément marquée par l’imaginaire lié à la technique d’inscription des sons et à leur couplage avec l’image, constitue un bon objet pour une réflexion, inscrite dans une perspective d’archéologie du « cinéma » parlant, sur la place et la fonction accordées à la voix dans certains dispositifs audiovisuels. En examinant le roman de Villiers de L’Isle-Adam sous l’angle de la mise en scène fictionnelle de diverses manifestations vocales, on peut définir les spécificités de la voix qui, dans le cas des automates comme au sein du dispositif cinématographique, affirme la présence de l’humain dans la machine. La question du simulacre anthropomorphe permet en effet de s’interroger sur d’inévitables tensions qui résultent de la conjonction de l’humain — le « grain » de la voix est associé à un individu — et de la machine utilisée pour la (re)production des sons et de l’apparence physique du sujet parlant. À cet égard, la représentation audiovisuelle de l’humain est foncièrement soumise à un phénomène de déliaison dans son rapport à une image animée dont les mouvements ne constituent pas la source effective des sons perçus par l’audiospectateur. Généralement occultée dans le cinéma parlant en raison du primat accordé à l’unicité du sujet-locuteur, cette déliaison fondamentale est associée dans L’Ève future aux inventions d’Edison, notamment à celles qui permettent de créer l’Andréide. Chez Villiers, l’angoisse provoquée par l’exhibition déshumanisante de la dimension machinique semble à la fois sous-tendre sa description de la technologie et motiver un dépassement par le recours aux sciences occultes. Or cet argument spirite est symptomatique de l’un des principaux paradigmes de la réception d’une voix enregistrée. Cette dernière induit en effet un régime de « présence-absence » qui, comme l’a montré Christian Metz, caractérise plus généralement « l’impression de réalité » au cinéma.
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