Artigo Acesso aberto Revisado por pares

Dix regards sur le dopage

2015; EDP Sciences; Issue: 92 Linguagem: Francês

10.1051/sm/2015008

ISSN

2118-5743

Autores

Sophie Javerlhiac, Aude Le Saux-Slimane,

Tópico(s)

Psychology and Mental Health

Resumo

Éditorial Dix regards sur le dopageLes dix articles qui constituent ce numéro spécial interrogent la question de la prévention du dopage.Quatre champs scientifiques (sociologique, criminologique, juridique, historique) sont convoqués pour analyser ce qui pose problème, nuit, ou, au contraire, peut favoriser la lutte contre le dopage.Tous suivent une même logique : la lutte contre le dopage ne peut se limiter à la mise en oeuvre d'un arsenal coercitif qui, pour utile qu'il soit, ne permet pas à lui seul de (( prévenir )) le dopage.Qu'est-ce que prévenir d'ailleurs ?Trop souvent, en effet, la prévention se résume à la sanction censée apeurer le sportif potentiellement déviant (Javerlhiac & Bodin, 2012 ;Javerlhiac, Bodin, & Cabagno, 2015).Il n'en est rien.Les affaires anciennes ou récentes de dopage, l'évolution des produits et méthodes utilisés témoignent de l'impuissance de la seule sanction à endiguer ce qu'il convient d'appeler un fléau (Bodin & Sempé, 2012).Fléau car le dopage, loin d'être en régression, progresse aussi rapidement que l'efficacité des contrôles.Fléau car il ne concerne pas seulement le sport de haut niveau et/ou le sport professionnel.Il accompagne tous les niveaux de compétition ou de pratique et surtout toutes les catégories d'âge.Le sportif n'est pas seulement (( un loup pour l'homme )), pour détourner la célèbre formule de Plaute.Il veut être meilleur que l'autre quel qu'en soit le coût bien sûr.Mais le dopage est aussi autre chose.Il est un viatique à la préparation, un substitut à l'absence de récupération, un moyen (( normal )) dans une société prophylactique où la prise de médicaments et autres psychotropes fait partie du processus normal du (( Culte de la performance )) (Ehrenberg, 1991).À moins qu'il ne soit tout simplement qu'un moyen comme un autre d'affirmer son appartenance au groupe ou d'oublier (( la fatigue d'être soi )) (Ehrenberg, 1998) dans un monde sportif incertain dans laquelle la victoire d'aujourd'hui n'augure pas nécessairement, loin s'en faut, celle de demain.Pour autant, l'exigence de résultat est là, la nécessité de la performance aussi dans un monde sportif en mutation vers un autre chose qui n'est plus ni le jeu, ni le sport, ni même, peut-être, un show moderne (Vigarello, 2002).N'y-a-t'il pas, tout simplement, une certaine forme d'utopie à penser qu'une réelle politique de prévention pourrait résoudre d'un coup un seul (( la tentation du dopage )) (Brissoneau, 2003) ?De nombreux débats l'ont rappelé : la compétition engendre des dérives.Brohm (1993) a montré depuis fort longtemps le rôle des performances et des records dans l'augmentation des conduites dopantes.Le dopage pose différemment un problème simple à savoir si le crime est normal ?Dès 1895, Durkheim nous invitait à réfléchir à cette question à laquelle il proposait un ensemble de réponses.Détournant à notre profit cette question demandons-nous si le dopage est normal ?Pour Durkheim : (( le crime est. . .nécessaire ; il est lié aux conditions fondamentales de toute vie sociale, mais par cela même, il est utile : car ces conditions [. . .] sont elles mêmes indispensables à l'évolution normale de la morale et du droit )) (p.72).Ces propos nous invitent tout simplement à observer, mais aussi à prévoir, les transformations de la société tout autant que de la société sportive.L'une influençant l'autre et inversement.Dans les deux cas la performance est essentielle, la prophylaxie évidente, la nécessité de paraître cruciale.Dix articles, donc, structurent ce numéro spécial.Le premier, écrit par Éric Péchillon, intitulé Le sportif surhomme et sous citoyen : faut-il renoncer à sa liberté individuelle pour faire du sport de compétition ?, interroge la place du sportif au plan légal.Au moment où la mise en oeuvre du Code mondial antidopage 2015 suppose une harmonisation des procédures et la reconnaissance de standards internationaux, il n'est pas inutile de s'interroger sur l'émergence d'un droit touchant directement à l'exercice des libertés individuelles.Un tel code oblige chaque État à modifier ses normes internes, sans pour autant renoncer à la cohérence de son système juridique.La transposition en droit interne de normes transnationales privées ne va pas sans poser problème en France, pays qui cherche à faire de la pratique du sport une mission de service public, quitte à créer une exception sportive.Il convient de s'interroger sur le principe et les conséquences du développement international d'une politique publique de lutte contre le dopage.Le sportif est-il un individu tellement exceptionnel qu'il mérite un traitement dérogatoire ?En acceptant le statut de sportif, l'individu doit-il renoncer à une partie de ses droits fondamentaux ?Une lutte efficace contre le dopage suppose la mise en place de moyens dérogatoires du droit commun.

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