Artigo Revisado por pares

<i>La Sapho des Lumières</i> (review)

2009; University of Toronto Press; Volume: 21; Issue: 3 Linguagem: Francês

10.1353/ecf.0.0065

ISSN

1911-0243

Autores

Catherine E. DuBeau,

Tópico(s)

Historical and Literary Analyses

Resumo

Reviewed by: La Sapho des Lumières Catherine Dubeau (bio) Huguette Krief, éd. La Sapho des Lumières. Saint-Étienne: Publications de l’Université de Saint-Étienne, 2006. 145pp. €15. ISBN 978-2-86272-367-9. Éditée par Huguette Krief, l’anthologie La Sapho des Lumières donne à lire quelques-uns des avatars classiques et préromantiques d’une figure fondatrice dans l’histoire de l’écriture féminine. Ici, les portraits de la poétesse composent une galerie variée; il fluctuent selon l’époque, le genre et la tradition auxquels ils se rattachent. Sous l’Ancien Régime, le destin de Sapho est exhumé dans le cadre d’un projet historique où des hellénistes tels que Robert Estienne, Tanneguy Le Fèvre, Anne Dacier, Pierre Bayle, François Gacon, Moutonnet de Clairfons et Billardon de Sauvigny (7) cherchent à réunir les pièces d’une biographie fragmentée, mêlant histoire et légende. Par le truchement d’une pièce de Ménandre (Sappho) et d’une héroïde d’Ovide s’était déjà implanté le mythe de l’amoureuse éplorée, abandonnée de son amant Phaon (8–9). Notons que cet épisode (imaginaire), sans rien enlever au caractère passionnel du personnage, l’avait dépouillé de sa composante saphique. De fait, la dimension lesbienne et fortement érotique des poèmes conservés (Hymne à Vénus; Ode à une amie) a posé problème à plusieurs générations d’écrivains, qui ont préféré passer ce pan de l’œuvre et de la biographie sous silence ou, comme Boileau et Gacon, intervenir dans les textes afin d’en atténuer la crudité et d’en masculiniser le destinataire de l’Ode. Il était impératif, souligne H. Krief, de forger une Sapho plus [End Page 471] conforme au goût des xviie et xviiie siècles, et ce, en prenant le parti de la dénonciation ou de l’occultation. Par ailleurs, les textes proposés montrent que la figure de Sapho a été continûment investie par les débats contemporains, devenant la porte-étendard de modes et de causes diverses. Chez Madeleine de Scudéry (Artamène ou Le grand Cyrus, 1649–53), elle revêt les atours d’une mondanité résolument précieuse à travers sa conception de l’amour (« je veux un amant, sans vouloir un mari: & je veux un amant, qui se contentant de la possession de mon cœur, m’aime jusqu’à la mort » [45]), ses idées sur l’éducation des femmes (« je ne sache rien de plus injurieux à notre sexe, que de dire qu’une femme n’est point obligée de rien apprendre » [42]) ou encore ses regrets devant l’attitude de ses concitoyens: « je suis rebutée de la sottise du monde, & de la persécution qui est inséparablement attachée à celles qui comme moi, ont le malheur d’avoir la réputation de savoir quelque autre chose que faire des boucles, & choisir des rubans » [39]). Mademoiselle de Scudéry rompt avec le mythe en faisant triompher Sapho sur Phaon, puis elle ouvre la voie à une récupération de la poétesse grecque comme représentante d’une feminité galante rimant avec esprit, culture et indépendance, celle-là même que l’on retrouve dans les lettres de Voltaire (« Épître à Madame la comtesse de Fontaines sur son roman de la comtesse de Savoie », 1713) et de Rousseau (« À Mademoiselle Th. qui ne parlait jamais à l’auteur que de musique », vers 1741–42). De la tradition hellénistique dont il était question plus haut, l’anthologie retranscrit les contributions de François Gacon (Sappho. Les odes d’Anacréon et de Sapho en vers français, par le poète sans fard, 1712) et de Julien-Jacques Moutonnet de Clairfons (Anacréon, Sapho, Bion & Moschus traduction nouvelle en prose; suivie d’un choix de pièces de différents auteurs par M***C*, 1773). Le premier, à la faveur d’un texte fort critique, dénonce les aspects licencieux, la « honteuse débauche » (57) contenus dans les poèmes, et leur oppose les armes de nouvelles traductions. Moutonnet...

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