La stratégie de la discrimination positive: Sarkozy et le débat français sur l'égalité
2009; Taylor & Francis; Volume: 17; Issue: 4 Linguagem: Francês
10.1080/09639480903251654
ISSN1469-9869
Autores Tópico(s)Communism, Protests, Social Movements
ResumoAbstract Nicolas Sarkozy has laid claim to the theme of 'positive discrimination', a theme which has provoked deep disagreements in the political sphere and civil society. Once issues related to discrimination appeared on the agenda, strategic responses have been the object of impassioned debates within political parties, intellectual currents, NGOs and the media. Faced with the failure of the 'French model of integration', President Sarkozy has promoted, albeit ambiguously, policies targeting ethnic minorities, but has met with strong criticisms. The latter are informed by an intransigent defence of the principle of the 'invisibility' of ethnic origins and race—based on equality through uniformity—but which is becoming more and more untenable in the multicultural society of the twenty-first century. In consequence, the debate on 'positive discrimination' brings into play not only opposing conceptions of how to acknowledge ethnic diversity, but also principles of equality and justice. Nicolas Sarkozy s'est emparé du thème de la «discrimination positive» qui génère de profonds clivages dans le monde politique et la société civile. Depuis la mise sur agenda de la question des discriminations en France, les stratégies d'action font en effet l'objet de débats passionnés qui traversent familles politiques, courants intellectuels, mouvements associatifs et médias. Devant l'échec du «modèle français d'intégration», l'option de politiques ciblées vers les minorités ethniques et raciales est avancée de manière ambiguë par le nouveau président et rencontre de fortes critiques. Celles-ci font apparaître une défense intransigeante d'un principe d'invisibilité des origines ethniques et de la «race», c'est-à-dire d'égalité par l'uniformité, de plus en plus difficile à tenir dans le cadre de la société multiculturelle de ce début du XXIe siècle. Le débat sur la discrimination positive met ainsi en jeu non seulement des conceptions opposées du statut de la diversité et de sa reconnaissance, mais aussi des principes d'égalité et de justice. Notes [1] Loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité; Loi n° 2003-1176 du 10 décembre 2003 relative au droit d'asile; Loi du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration; Loi n° 2007-1631 du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile. [2] Bien que n'insistant pas sur cet aspect de sa biographie, Nicolas Sarkozy met en revanche souvent en avant son côté outsider parmi les responsables politiques issus de familles bourgeoises ou liées à la haute fonction publique depuis plusieurs générations. [3] Le terme est en passe de s'imposer dans le lexique politique. Il est démarqué du Canada d'où il a été importé en particulier par Yazid Sabeg, homme d'affaires d'origine algérienne, particulièrement influent dans les milieux entreprenariaux et dans le parti majoritaire UMP (Sabeg 2004 Sabeg, Y. 2004. La Discrimination positive, pourquoi la France ne peut y échapper, Paris: Calmann Lévy. [Google Scholar]). Il est également utilisé par le Conseil Représentatif des Associations Noires (CRAN), association «représentative» des Noirs de France, créée récemment et en pointe sur les questions de représentation politique des Noirs et des «citoyens de la diversité». [4] Voir http://www.charte-diversite.com/ (consulté le 5 février 2009). [5] Voir l'argumentaire développé par l'Institut Montaigne dans son rapport Ouvrir les grandes écoles à la diversité (2006). Plusieurs grandes écoles ont mis en place des dispositifs de discrimination positive pour faire entrer les élèves des classes populaires, mais surtout d'origine immigrée, dans leurs effectifs. A propos de Sciences Po, voir Sabbagh (2002 Sabbagh, D. 2002. Affirmative action at Sciences Po. French Politics, Culture, and Society, 20(3): 52–64. [Crossref] , [Google Scholar]). [6] Le Monde, 21 novembre 2003. [7] L'association délinquance-«bandes ethniques» fera florès dans les discours de Nicolas Sarkozy. Cela se traduira par l'usage du terme «racaille» pour parler de jeunes de banlieue à sa proposition de les nettoyer au Kärcher qui sera évoquée lors des émeutes de 2005. Sarkozy ne se privera pas de justifier son intérêt pour des «statistiques ethniques» dans les fichiers de police afin de faire la lumière sur les logiques cachées de la délinquance (déclaration sur RMC, 14 février 2006). [8] Le Parisien, 20 octobre 2006. [9] Décision n° 2007-557 DC, 15 novembre 2007. [10] Lettre de mission à Simone Veil, 9 avril 2008. [11] SOS Racisme, 8 janvier 2008, http://www.sos-racisme.org/Touche-pas-au-preambule.html [12] La loi n° 87-517 du 10 juillet 1987 impose un quota de 6% de salariés handicapés aux entreprises de plus de 20 salariés. Le non respect du quota déclenche une pénalité financière. En 2002, moins de 4% de salariés handicapés travaillaient dans les entreprises concernées. Cette loi a été renforcée et élargie en 2005. [13] Loi constitutionnelle n° 99-569 du 8 juillet 1999, dite loi sur la parité. [14] Voir ce passage du rapport: «La question des statistiques ethniques, dont le comité, pas plus que l'immense majorité des scientifiques, ne comprendrait qu'elles soient interdites, tant il est vrai que la lutte contre les discriminations suppose de pouvoir les mesurer » (Comité Veil 2008 Comité Veil (2008) Comité de réflexion sur le préambule de la Constitution, rapport au Président, http://www.elysee.fr/documents/index.php?lang = fr&mode = view&cat_id = 8&press_id = 2138 [Google Scholar], p. 77). [15] Chef d'entreprise d'origine algérienne, Yazid Sabeg a pris de nombreuses positions publiques en faveur de la discrimination positive et des statistiques ethniques, notamment dans un rapport pour l'Institut Montaigne (Sabeg & Méhaignerie 2004 Sabeg, Y. and Méhaignerie, L. 2004. Les Oubliés de l'égalité des chances. Participation, pluralité, assimilation … ou repli?, Paris: Institut Montaigne. [Google Scholar]). Il a lancé un «Manifeste pour l'égalité réelle. Oui nous pouvons» après l'élection de Barack Obama, le 8 novembre 2008, qui réclame la «mise en œuvre effective d'un programme d'égalité réelle».
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