Expériences de fin du monde : un jansénisme en convulsion, un calvinisme en prophétie
2001; Éditions de l'EHESS; Issue: 114 Linguagem: Francês
10.4000/assr.20725
ISSN1777-5825
Autores Tópico(s)Historical Studies and Socio-cultural Analysis
ResumoAix-en-Provence, Édisud, 1999, 272 p. 1 Au commencement, le verbe du malheur : une foi combattue, une culture stigmatisée au risque de sa perte absolue, des sites à forte charge symbolique anéantis, des territoires de religion dévastés.Nulle histoire, sans doute, qui ne soit tissue de ces violences et fureurs.Mais nulle, aussi bien, qui ne décide par là même de toute une raison, patiente ou explosive, de refus radical.Au seuil de notre histoire contemporaine, deux rigoureuses institutions de religion connurent oppressions à la mesure de leur emprise culturelle et cultuelle, de leur science de Dieu, et de leurs défis politiques.Jansénisme et calvinisme furent proies de tous les tourments des siècles où ils s'épandirent.Et inventèrent, au sein même des allégeances religieuses dont ils ne cessèrent de témoigner, des épreuves singulières de corps et de verbe, pour tenter non seulement de simplement survivre au monde qui les accablait, mais aussi bien d'y installer des ferments de dissidence sans recours.De là les convulsions jansénistes à Paris et en toutes provinces, et les prophéties calvinistes en terre languedocienne, puis en exil européen.Trois ouvrages affinent la connaissance de ces épreuves, fondées sur un argumentaire où se conjoignent miracles, convulsions, théorème de fin du monde, millénarisme et prophéties.Du jansénisme, J.-P.Expériences de fin du monde : un jansénisme en convulsion, un calvinisme en p... Archives de sciences sociales des religions, 114 | 2009 1 Chantin rappelle l'avènement et l'ample déploiement au vif de l'Église de France.Et ses recompositions au fil des décennies et des régions, jusqu'au coeur du XIX e siècle en l'espace lyonnais.J.-P.Chabrol reformule le paysage du prophétisme cévenol après le soulèvement camisard, à partir de la figure emblématique d'Élie Marion et ses voyages d'une ville d'Europe à l'autre.On pressent que les ouvrages de Chantin et Chabrol offrent aux sciences sociales une exemplaire contribution à l'intelligence des opérations qui travaillent le siècle des Lumières de son aube à sa fin.2Dans son Jansénisme, J.-P.Chantin tente de condenser en un peu plus d'une centaine de pages l'essentiel de ce qu'il convient de savoir sur le mouvement de Port-Royal : les exigences de collections de brève synthèse sont rudes.Comment y parvenir, quand l'A.convient, après R. Taveneaux et A. Gazier, qu'il faut traiter du jansénisme au pluriel, si l'on veut être au plus près de l'histoire.Jean Orcibal avait à son tour distingué augustinisme, port-royalisme, grand jansénisme du XVII e , richérisme, quesnellisme, selon les figures organisatrices de cette mouvance de religion.J.-P.Chantin y réussit au mieux, au prix sans doute d'une composition très ramassée du répertoire historique, qui peut déconcerter le lecteur par sa densité.Prenant le parti d'une « vision globale, mais nécessairement succincte, de cette 'énigme historique' », l'A.dessine cependant une fresque à grands traits, tous pour l'essentiel pertinents et savamment présentés, de cette vaste entreprise de refondation religieuse aux confins de l'hétérodoxie et d'un radicalisme fondamentaliste.Périodisation sans surprise, mais sans lacunes.L'ère des grands initiateurs, porteurs d'enjeux théologiques décisifs : débat sur la grâce, la nature déchue de l'homme, l'absolue contrition pour une parfaite communion, le nécessaire retour aux pratiques des premiers temps chrétiens, etc. Voici le « premier jansénisme ».Des personnages emblématiques lui donnent toute sa splendeur et sa résonance, noms entrés en l'histoire comme figures essentielles, et qui font désormais partie de notre patrimoine culturel : Saint-Cyran, Antoine Arnauld et son prestigieux lignage, Nicole, Pascal.Tous inscrivant une profonde crise au coeur de l'Église romaine : en 1654, la bulle Cum occasione dénonce cinq propositions portées au compte de Jansénius, et le clergé exige la signature d'un formulaire condamnant l'Augustinus de l'évêque d'Ypres.À ce grand moment de vertu religieuse et de dissidence culturelle succède une autre configuration, plus politique et « populaire ».Le rasement de Port-Royal à partir de 1711, la bulle Unigenitus condamnant en 1713 cent une thèses de Quesnel, font basculer le jansénisme en une clandestinité fiévreuse.Appelants, réappelants, opposés à l'interdit pontifical : toute une frange du bas clergé et des hauteurs de l'institution ecclésiale, passent en insoumission, tandis que les héritiers de Port-Royal forment terrain de révolte de corps et d'âme.Un relais politique : le Parlement, largement habité de jansénisme, opposé à l'absolutisme monarchique.Au sein de l'Église, de nombreux ordres et congrégations à leur tour entrés en inquiétude.J.-P.Chantin évoque les batailles frontales ou feutrées, jusqu'à la vaste entreprise des convulsions, en laquelle il note la naissance d'un « merveilleux » janséniste : temps des miracles et des transes sur le tombeau du diacre Pâris, qui durera jusqu'à la fin du siècle, porteur de défis politiques, annonciateur d'ébranlements du siècle 1 .L'A. propose quelques critères pour démêler la question redoutable du rôle, direct ou indirect, celui-ci plus vraisemblable, du convulsionnisme janséniste, figuriste ou plus apaisé, dans l'entrée de la société française en Révolution.Question majeure, réponse nécessairement équivoque.Ralliement à la constitution civile du clergé pour certains, opposition absolue pour d'autres.De là des sécessions en chaîne, des « sectes » à foison -tout un paysage d'« agonie » qu'aggravent la signature du Expériences de fin du monde : un jansénisme en convulsion, un calvinisme en p...
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