Le commerce des armes à Djibouti de 1888 à 1914

1971; Q24023140; Volume: 58; Issue: 213 Linguagem: Francês

10.3406/outre.1971.1560

ISSN

2419-4522

Autores

Agnès Picquart,

Tópico(s)

African history and culture studies

Resumo

Destinées aux Bédouins traditionnellement armés, tant en Afrique qu'en Arabie, surtout quand s'ajoutait à cet esprit naturellement et nécessairement belliqueux des rivalités endémiques entre tribus, à la protection des agglomérations de la brousse et de la mer, où règne une insécurité constante, les armes et les munitions transitant par Djibouti entre 1888 (date de la véritable naissance de la ville) et 1914 (année qui marque le renversement de la conjoncture politique générale dans la mer Rouge) servaient également de contrepartie au trafic de chair humaine encore vivace en ces contrées. L'anarchie non moins endémique, liée à la nature même du gouvernement et de l'organisation politico-économique, qui sévissait en Ethiopie et en Arabie, entrait, elle aussi, pour une large part dans la consommation de matériel de guerre réalisée en ces contrées, et ouvrait la porte à l'impérialisme européen. Celui-ci s'effectuait ensuite soit par la conquête militaire, soit par la corruption des chefs indigènes au moyen d'armes, et il se doublait d'une nécessaire pacification parfois difficile. Déclassées, le plus souvent, remaniées à Liège, mais n'excluant pas toutefois un matériel neuf et récent, les armes provenaient essentiellement de France et, dans une moindre mesure, de Belgique, d'Allemagne, d'Angleterre, voire même parfois d'Extrême-Orient. Elles étaient mises en vente sur place par des chefs militaires, des diplomates, des commerçants officiels et déclarés, autant que par des contrebandiers ou des particuliers, selon des normes législatives fondées principalement sur la convention de Bruxelles de 1890 et les différents traités qui régissaient les relations économiques des puis sances européennes avec l'Arabie et l'Éthiopie, la côte Somalie étant acquise totalement aux premières par voie de protectorat ou de colonisation. Dans son aspect évolutif et dynamique, le commerce des armes à Djibouti subit un accroissement continu, entrecoupé certes de légères régressions, marqué par un toile général, lancé par l'ensemble des nations concernées par le phénomène. De là une série de dispositions visant à entraver sa pour éviter des conséquences regrettables. Révisions des traités internationaux, arrêts de transit provisoires, actions de police maritime, arrêtés, concertations, démarches diplomatiques : les chiffres accusent implacablement sinon une progression du mal, du moins l'impossibilité d'un retour en arrière. Outre l'inefficacité foncière de certaines lois, au double point de vue législatif et pratique, toutes ces mesures n'étaient en fait qu'un rideau mouvant de jeux diplomatiques masquant des intérêts puissants : d'une part l'impérialisme européen, d'autre part les impératifs économiques (marchés pour l'industrie d'armement) : le fondement de la prospérité de Djibouti en constitue le meilleur des exemples. A noter enfin l'importance quantitative et l'extension géographique de la diffusion du matériel issu de Djibouti, et la rationalisation de sa commercialisation traits spécifiques de la période considérée.

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