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Jamblique, Doxographie et Philosophie dans le Traité De l'Âme

1997; University of Iowa Press; Volume: 8; Issue: 1 Linguagem: Francês

10.1353/syl.1997.0006

2160-5157

Annick Charles-Saget,

Historical and Literary Studies

A. Charles-Saget: Jamblique, Doxographie et Philosophie 121 Jamblique, Doxographie et Philosophie dans le Traité De l'Âme Annick Charles-Saget Il est impossible de lire un texte, un fragment de Jamblique ou une doctrine qu'on lui attribue, sans se trouver renvoyé à la même question: est-ce là phUosopher? 1 ne s'agit pas seulement de la théurgie ou de l'intégration des rites et oracles. La distinction traditionnelle entre les philosophes et les "théurgistes" ne suffit pas, puisque cette distinction ne peut que résulter d'un rapport au savoir qui lui est antérieur et qui, chez JambUque, laisse place, ou demande place pour les rites et leur mode d'unification. Dans son introduction à l'édition des fragments des commentaires aux dialogues de Platon, J.M. Dillon parle de Jamblique comme d'un 'philosophe de second rang."1 Que signifie? Assurément autre chose que la mise au second rang de la phUosophie eUe-même. Si nous reprenons les éléments originaux de la pensée de JambUque, selon ce qui lui est désormais attribué en propre, nous pouvons rassembler ses apports sous deux rubriques: —l'une qui concerne la constitution plus complexe du système, —l'autre qui indique les nouveaux modèles de pensée. Dans la constitution plus complexe du système, on peut distinguer ce qui relève d'une élaboration des paradoxes et ce qui constitue des propositions de continuité pour la systématisation elle-même. En somme, ce qui touche aux extrêmes et ce qui assure les médiations. L'élaboration des paradoxes renvoie, en effet, à la réflexion sur les termes extrêmes du système: le Principe (l'Un-Bien) et le Mal. Chaque penseur néoplatonicien est contraint, par le caractère instable de la pensée, à reprendre, réarticuler, la liaison/déliaison du Principe avec ce qu'il engendre, ou la liaison/déUaison de Fen-deçà avec ce qui est. Je laisserai de côté ces extrêmes. A l'intérieur du système lui-même, on accorde à Jamblique d'avoir expUcité, ou, pour parler comme Timée, d'avoir parfois "comblé" certains intervalles: ainsi, 1 lamblichi Chalcidensis: in Platonis Dialogos Commentariorum Fragmenta, JM. Dillon, ed. (Leiden 1973) vii. 122Syllecta Classica 8 (1997) Jamblique aurait distingué deux principes, l'Un ineffable et l'Un présidant au monde noétique; il aurait, selon Damascius, proposé la médiation de la dyade ?t??a?/a?te????; son rôle à l'égard de la doctrine proclienne des hénades demeure questionné; dans l'intelligible, il aurait insisté sur la distinction entre intelligible et intellectif; enfin, pour faire bref, il aurait eu souci de la variété des âmes, entre l'âme totale et les âmes particulières. Cette complexité croissante du système exigeait que soient utilisés de nouveaux modèles de pensée. Nouveaux ou nouveUement réinterprétés. Combler des intervalles est une opération qui a toujours, depuis le Timée, exigé un modèle. Et l'on sait que, pour Jamblique, le modèle s'incarne au moins dans un nom propre, celui de Pythagore. Mais s'il y a bien chez Jamblique, ainsi que l'indique DJ. O'Meara, une renaissance de Pythagore,2 cette renaissance implique de nécessaires anachronismes, eux-mêmes porteurs d'inévitables ambiguïtés. Ma question se transforme donc en celle-ci: Que devient la relation de la philosophie à son modèle quand cette relation est archaïsante? Platon s'inspirait de la recherche des mathématiciens de son temps et non de Pythagore, qui est à peine cité. Quand Jamblique insiste sur le modèle pythagoricien, non seulement comme modèle de vie, mais aussi comme modèle de pensée, nous pouvons donc nous interroger sur l'apport de cette référence quant à la philosophie et nous demander si ce que gagne le "système" n'est pas ce que peut perdre la pensée. Ne s'agit-il pas de composer, concüier, aménager, mettre en résonance, organiser une doctrine, plutôt que de donner vie à une pens...