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Voltaire et La Mort de César

1982; Volume: 1; Linguagem: Francês

10.7202/1011787ar

1927-8810

Georges-L. Bérubé,

Historical and Literary Studies

Voltaire et La Mort de CésarDans l'esprit de Voltaire, comme dans celui d'un certain nombre de ses contemporains, 1 La Mort de César représentait une hardiesse telle que l'auteur ne s'étonna guère de devoir attendre plus de dix ans avant de voir sa tragédie jouée sur le Théâtre français. 2La suppression des intérêts amoureux et des rôles féminins -nous connaissons l'influence prépondérante des comédiennes de l'illustre compagnie dans le choix des pièces, ainsi que le goût du public de l'époque -, l'altération de la forme de la tragédie -La Mort de César n'avait que trois des cinq actes prescrits par la dramaturgie classique, -l'interprétation nouvelle d'un mythe séculaire faisant de Brutus le fils de César plutôt qu'un simple conjuré et, enfin, l'idéologie de la pièce, suspecte parce qu'inspirée trop ouvertement d'un modèle anglais qui était jugé révolutionnaire en France à ce moment-là, voilà autant de nouveautés dont Voltaire crut pouvoir s'enorgueillir.Quelque osées que fussent ces innovations et bien que chacune eût sans doute son importance dans l'esprit de Voltaire, une seule retiendra notre attention aujourd'hui, soit l'élimination de l'intrigue amoureuse et la prétention de l'auteur d'avoir réussi, par là, à "guérir le théâtre français de cette contagion [l'amour]," autrement dit, à purger le théâtre des galanteries qui l'affadissaient.Dans sa correspondance et dans ses écrits, Voltaire revient sans cesse sur l'idée qu'il faut opérer une révolution qui débarrasse le théâtre des fadaises amoureuses et détrôner, par conséquent, le despote dont parle le comte Algarotti dans sa lettre à l'abbé Franchini: "L'amore è signor despotico délie scene francesi 3 ."A notre humble avis, si la pièce relate le renversement d'un despote appelé César, elle ne réussit pas pour autant à détruire l'amore despotico, ni même à purger le théâtre français.Avant d'aborder le sujet proprement dit, rappelons brièvement l'action de La Mort de César.Après avoir subjugué Rome, César est sur le point de se proclamer roi, lorsqu'il avoue à Antoine que Brutus, ce républicain féroce, ennemi des tyrans, est son propre fils qui s'ignore.S'opposant aux conseils d'Antoine qui préconisait l'utilisation de la force pour imposer son règne, César entreprend de se faire aimer de Brutus et du Sénat.A l'acte II, Brutus dénonce avec violence les projets politiques de César et, devant ses amis alarmés, il s'engage à tuer quiconque voudrait détruire la République et la liberté romaine.Survient César, qui produit une lettre prouvant incontestablement à Brutus qu'il est le fils de son ennemi implacable.Abasourdi par cette révélation, Brutus s'acharne tout de même à ne pas reconnaître son père dans le tyran de Rome.A l'acte III, Brutus apprend aux