Artigo Revisado por pares

Historiens d’Europe, historiens de l’Europe: défense et illustration de l’histoire de l’Europe. Sous la direction de Denis Crouzet

2018; Oxford University Press; Volume: 72; Issue: 4 Linguagem: Francês

10.1093/fs/kny183

ISSN

1468-2931

Autores

Edward Ousselin,

Tópico(s)

Cultural Identity and Heritage

Resumo

Mot polysémique par excellence, ‘l’Europe’ est en cela comparable à ‘l’histoire’. De nombreux historiens ont tenté de définir ce qu’est l’Europe, souvent dans une perspective téléologique, parfois afin de contribuer activement à son avènement en tant qu’entité sociopolitique. Ce livre collectif prend pour point de départ le manque d’enthousiasme que suscite actuellement l’idéal européen parmi les Européens eux-mêmes. Or, cette absence d’affect ou d’identification vis-à-vis de l’Europe — par opposition à la nation, le groupe ethnique ou la religion — peut également se constater parmi les plus grands historiens: ‘Braudel aime la Méditerranée, il aime la France, il ne dit pas aimer l’Europe’ (Crouzet, p. 149). L’histoire de l’Europe serait-elle celle d’une fiction, d’un rêve intellectuel qui s’est déjà évanoui? Comme le dit Denis Crouzet dans son Avant-propos, ‘l’Europe est aussi victime d’un trop d’histoire qui n’est pas, précisément, son histoire, qui l’oblitère plus qu’elle ne l’éclaire’ (p. 7). Les dix-huit articles de ce livre sont divisés en deux grandes parties: ‘Penser et écrire par l’Europe’ et ‘Écrire et penser pour l’Europe’. Chaque chapitre est consacré à la dimension européenne dans l’œuvre (et parfois la vie) d’un historien célèbre: Ernst Kantorowicz, Hugh Trevor-Roper, Fernand Braudel, Norbert Elias, Lucien Febvre, Jean-Baptiste Duroselle, Jacques Le Goff, etc. Il ne s’agit évidemment pas d’un échantillon représentatif parmi les historiens européens (notons au passage qu’aucune femme ne figure dans la liste). Ceux qui sont représentés dans ce volume ont été choisis en grande partie à cause de la portée et de l’influence de leurs œuvres. Un regret à exprimer ici: les indications bibliographiques ne sont fournies que sous forme de notes en bas de page. Un seul chapitre (celui de Jean-Baptiste Delzant sur Johan Huizinga) est suivi d’une véritable bibliographie. Néanmoins, les lecteurs qui s’intéressent à la thématique historique européenne et à la situation actuelle de l’Union européenne trouveront plusieurs articles originaux et utiles dans ce livre. Dans son article sur Hugh Redwald Trevor-Roper (1914–2003) et ‘la crise générale de l’Europe moderne’, Jean-François Dunyach trouve que ‘c’est finalement une autre Europe que dessinait Trevor-Roper, une Europe composée de sociétés évolutives, des corps propres partageant un fonds commun d’idées et de croyances’ (p. 132). À propos d’Henri Pirenne (1862–1935), Marc Boone et Sarah Keymeulen rappellent que les conditions dans lesquelles s’effectuent un travail de recherche historique influencent généralement les résultats de cette recherche: ‘Concernant l’Europe cela mène au constat d’une division entre une Europe occidentale, libérale et pacifique marquée par l’héritage de l’humanisme et de la Révolution française et une Europe centrale où prévalait une société autoritaire et hiérarchisée, basée sur un nationalisme imprégné de racisme’ (p. 225). Pour sa part, Yann Bodier, qui caractérise Pierre Chaunu (1923–2009) comme un ‘penseur global de l’histoire européenne’, voit en lui un défenseur d’une Europe confédérale ‘respectant le génie propre des nations pour assurer la transition vers une Europe politique’ (p. 327). Appréhender l’Europe à travers les complexités de sa longue histoire, c’est tenter d’en apercevoir le devenir: tel pourrait être le résumé le plus succinct de ce livre.

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