Mon pays vend des armes by Anne Poiret
2020; American Association of Teachers of French; Volume: 93; Issue: 3 Linguagem: Francês
10.1353/tfr.2020.0257
ISSN2329-7131
Autores Tópico(s)China's Global Influence and Migration
ResumoReviewed by: Mon pays vend des armes by Anne Poiret Denis R. Pra Poiret, Anne. Mon pays vend des armes. Arènes, 2019. ISBN 978-2-7112-0106-8. Pp. 304. Luxe et gastronomie sont des piliers visibles de l'économie française. En revanche, certains s'étonneront que la France soit depuis 2017 le troisième pays vendeur d'armes au monde (derrière les États-Unis et la Russie). Poiret, journaliste et réalisatrice de documentaires (notamment sur les "après-guerres"), souligne que la position de la France a considérablement prospéré sous la présidence Hollande, faisant de ce dernier "l'un des plus grands vendeurs d'armes de la Ve République" (10). Poiret s'interroge alors: comment la France, "patrie des droits de l'homme" (8), peut-elle concilier ses valeurs humanistes et vendre des armes tuant des milliers de civils en Libye, en Irak ou au Yémen? Grâce à des mois d'investigations, d'entretiens, de lectures de dossiers complexes, Poiret réussit à mettre en lumière le difficile exercice d'équilibriste dans lequel les politiques français se sont lancés pour à la fois respecter les conventions internationales sur lesquelles la France s'est engagée (particulièrement le Traité sur le commerce des armes: TCA) et maintenir des objectifs de ventes favorisant des fleurons de l'industrie française nommés Dassault, Thales ou Safran. Poiret souligne que certains politiques se sont fait les V.R.P. de ces entreprises. Jean-Yves Le Drian, ministre de la Défense (2012–2017), en est l'illustration parfaite. Serge Dassault (décédé en 2018) affirmait à son sujet: "c'est le meilleur ministre de la Défense que j'aie jamais connu" (64). À son actif: les premières ventes de Rafale à l'Égypte, évitant à l'armée française d'avoir à acheter d'inutiles avions pour maintenir les usines Dassault en activité. Rafale, canons Caesar, armes militaires de surveillance… L'offre française est riche et variée et la liste des pays acheteurs croissante: Arabie saoudite, Inde, Qatar, Émirats arabes unis… On relèvera toutefois le profil peu recommandable de ces clients. À quelles fins sont achetées ces armes? Les Saoudiens (aidés des Émirats arabes unis et du Koweït) tuent-ils des civils au Yémen? L'Égypte utilise-t-elle le matériel de surveillance militaire pour opprimer sa population? L'auteure relève l'absence de débat public en France sur ces questions épineuses, même si le scandale Khashoggi (journaliste [End Page 271] saoudien assassiné dans le consulat de son pays en Turquie) a quelque peu changé la donne. Pourtant, lorsqu'ils sont confrontés à des questions dérangeantes, c'est avec aplomb que les politiques français invoquent le "secret-défense" ou formulent quelques explications mensongères: "il est faux de dire que l'Arabie saoudite est un grand client de la France dans quelque domaine que ce soit…" (272) (Président Macron, octobre 2018). Car l'Arabie saoudite est bien le deuxième client de la France après l'Égypte. Les achats de ces deux pays confortent une troisième place de vendeur d'armes à la France. Poiret souligne que le but de l'Hexagone est de "garder cette place de troisième […] producteur mondial" (283) afin que l'armée européenne prenne forme autour d'elle. Mais "la France aura-t-elle un jour à s'expliquer sur ses ventes d'armes?" (291). Des questions pertinentes que soulève cet ouvrage passionnant dont la lecture est parfois entravée par le nombre important d'acronymes mais qui intéressera tous ceux qui suivent politique et diplomatie. Denis R. Pra Los Angeles Pierce College (CA) Copyright © 2020 American Association of Teachers of French
Referência(s)