120 battements par minute réalisé par Robin Campillo
2018; American Association of Teachers of French; Volume: 92; Issue: 2 Linguagem: Francês
10.1353/tfr.2018.0033
ISSN2329-7131
Autores Tópico(s)French Historical and Cultural Studies
ResumoReviewed by: 120 battements par minute réalisé par Robin Campillo François Massonnat Campillo, Robin , réal. 120 battements par minute. Int. Nahuel Pérez Biscayart, Arnaud Valois, Adèle Haenel, Antoine Reinartz . Memento, 2017. Primé à Cannes avant de sortir en août puis de triompher aux César, 120 battements par minute est un film en tout point remarquable, si bien que le terme de chef-d'oeuvre pour le qualifier ne paraît nullement usurpé. Marqué des sceaux d'éros et thanatos, le film retrace la bataille menée par les membres d'Act Up France au début des années 1990. Avec toute la rage de la jeunesse et l'urgence de la mort qui rôde, ils se démènent pour faire avancer la recherche contre le SIDA et pousser les pouvoirs publics à agir tandis que les homosexuels, les prisonniers et les victimes de transfusions de sang contaminé meurent à petit feu au fur et à mesure que leurs taux de lymphocytes T4 s'effondrent. Simple et efficace, la structure du film s'appuie dans un premier temps sur trois grands types de séquences avant de laisser place à des scènes plus intimistes: les assemblées générales durant lesquelles les activistes d'Act Up France débattent, s'organisent, s'indignent, se disputent, voire se déchirent, les interventions coups-de-poing des membres de l'association, et les scènes plus festives de sorties en boîte de nuit ou de gay prides. Au sein de ce récit résolument choral émerge toutefois une histoire d'amour entre Nathan (Arnaud Valois) et Sean (Nahuel Pérez Biscayart). [End Page 212] Le premier est grand, athlétique et plein de santé tandis que le second, séropositif, affronte le déclin physique que lui inflige la maladie et avance avec fierté vers la mort. La maîtrise qui se dégage de la mise-en-scène, de la photographie et du montage, loin de figer le film, contribue à donner au récit une puissance émotionnelle très rare que sert à merveille la musique d'Arnaud Rebotini. En effet, de nombreux sanglots se firent entendre à plusieurs reprises lors de chacune des projections auxquelles j'ai assisté. Cette émotion, loin de naître d'une surenchère de pathos, résulte en fait d'un réalisme assumé. Les personnages sont présentés par petites touches, sans dialogues explicatifs ni scènes superflues, et nous apparaissent comme mus d'une irrépressible envie de vivre que vient contredire la force de la maladie. Malgré sa durée (2h23), le film avance à un rythme endiablé sans jamais succomber à la tentation d'un montage frénétique. Au contraire, les scènes se déploient dans toute leur ampleur, toujours chargées d'enjeux dramatiques qui tiennent le spectateur en haleine. Ainsi le suspense tend-il chacune des séquences où les personnages se lancent dans une action coup de poing contre un laboratoire pharmaceutique ou des édiles. De même, chaque assemblée générale frappe par la vivacité de discussions empreintes d'un réalisme confondant. Toutefois, à ce réalisme viennent s'adjoindre des scènes d'une merveilleuse poésie comme lorsque la poussière en suspension dans la boîte de nuit se transforme en cellules VIH en mutation. Le rêve mortifère de Sean qui voit la Seine teintée de rouge compte parmi les scènes les plus impressionnantes d'un film marquant. François Massonnat Villanova University (PA) Copyright © 2018 American Association of Teachers of French
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