Les hautes lumières par Xavier de Moulins
2018; American Association of Teachers of French; Volume: 92; Issue: 2 Linguagem: Francês
10.1353/tfr.2018.0071
ISSN2329-7131
Autores Tópico(s)Social Policies and Family
ResumoReviewed by: Les hautes lumières par Xavier de Moulins Nathalie Degroult Moulins, Xavier de. Les hautes lumières. Lattès, 2017. ISBN 978-2-7096-6059-4. Pp. 382. Mariés depuis dix ans, Nina, la coiffeuse française de Bondy, et Tahar, le chauffeur de taxi marocain, n'ont qu'un rêve: fonder une famille. Ils ont quitté leur cité, se sont installés en banlieue pavillonnaire et ont cru "au miracle de l'assistance médicale à la procréation" (33), mais après six traitements infructueux de fécondation in vitro (FIV), le couple miné plonge vers sa désintégration. Aliénée par la souffrance, Nina s'éloigne progressivement de Tahar. Ce dernier, cherchant à évacuer la douleur du présent, sillonne la capitale à bord de son taxi. Un soir, il fait la connaissance de Françoise, une cliente enceinte qu'il conduit d'urgence à l'hôpital. Commence alors une amitié inattendue entre la photographe et le chauffeur. Tahar devient l'inspiration de l'exposition "L'autre visage de la banlieue" qui "raconte une histoire simple, d'harmonie et de paix" (292). Françoise permet à Tahar de vivre une autre réalité et surtout d'échapper à son couple défaillant. Pour son cinquième roman, Moulins examine un sujet intime: l'infertilité féminine. Il décrit avec pudeur et délicatesse la souffrance physique (prise d'hormones et de poids, interventions médicales) et les troubles psychologiques (doutes, anxiété et remises en cause) d'une femme fracassée: "À l'origine de son désir de fonder une famille, il y a l'amour d'un père qui s'éteint" (75). En effet, Alban fut pour Nina un père exemplaire, adulé par une fille qui"a grandi protégée par son ombre. [...] Quand elle est au plus bas, c'est à lui qu'elle pense, c'est lui qu'elle invoque pour rallumer la flamme" (71). Si le manque d'enfant détruit peu à peu Nina, il est aussi vécu comme une honte familiale. Samia, sa belle-mère, l'explique: "une famille, c'est d'abord des enfants. Un couple, c'est des enfants. Tahar est mon seul fils, il doit nous donner des petits-enfants. Sinon, c'est un sacrilège et le malheur qui s'abat" (98). Les parents de Tahar—un père ouvrier chez Renault, une mère femme de ménage—portent eux-aussi des blessures: celles de l'histoire "banale d'immigration et de va-et-vient entre les siècles, la nostalgie du bled, le travail de forçat, la vie dans la cité, les efforts et les économies" (89). Pour sauver l'honneur de la famille et réparer le coeur brisé de Nina, Fatia, la soeur de Samira, fait l'ultime sacrifice: elle offre son fils, Abdelkrim, au couple infertile. Le jeune garçon ressemble terriblement à son cousin Tahar et possède un sourire qui "ensorcelle Nina, lui procur[ant] chaque fois une sensation de bien-être, un prodigieux frisson" (95). Même si les formalités administratives s'avèreront difficiles, car "la France n'est plus la terre d'accueil qu'elle a été" (192), Nina mènera un combat acharné pour adopter le petit Marocain. S'aidant d'une analyse psychologique fine, l'auteur nous plonge dans l'intimité de personnages bouleversants, fragiles et profondément humains. Moulins esquisse le beau portrait d'une femme combattante, qui malgré ses moments d'angoisse, de frustration et de désespoir ne renoncera jamais à devenir mère. Les hautes lumières est un roman saisissant dont le dénouement dramatique ne laisse pas indemne. [End Page 271] Nathalie Degroult Siena College (NY) Copyright © 2018 American Association of Teachers of French
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