Le scribe par Célia Houdart
2021; American Association of Teachers of French; Volume: 94; Issue: 3 Linguagem: Francês
10.1353/tfr.2021.0059
ISSN2329-7131
Autores Tópico(s)Diverse Cultural and Historical Studies
ResumoReviewed by: Le scribe par Célia Houdart Vivan Steemers Houdart, Célia. Le scribe. P.O.L, 2020. ISBN 978-2-02-8180-4972-3. Pp. 208. Un jour d'automne 2018, Chandra Roy, un jeune Bengali, arrive à Paris pour commencer son doctorat en mathématiques à l'Institut Henri-Poincaré. Ce fils aîné d'une famille brahmane aisée de Calcutta loge chez un vieux couple excentrique qui gère une bibliothèque et un musée polonais sur l'île Saint-Louis. S'adaptant facilement au monde cosmopolite du Quartier Latin et de la petite communauté scientifique, le jeune homme brillant et aimable fait la rencontre de Margot, une étudiante en lettres avec qui il vit une histoire d'amour. C'est elle qui, trouvant un jour Chandra accroupi, torse nu, en train de noircir des papiers de signes et de calculs, le compare au scribe du Louvre, une ancienne sculpture égyptienne. En effet, tel un scribe sage, Chandra résout non seulement des formules mathématiques, mais il déchiffre également les graffiti bibliophiles laissés par Restif de la Bretonne sur les parapets longeant la Seine. Lui-même petit-fils d'un imprimeur, Chandra arpente les rues de la capitale en observateur perspicace. Parallèlement, une fenêtre s'ouvre sur un autre monde, celui de la famille Roy à Calcutta avec qui Chandra converse régulièrement sur Skype. Son père Manoj, ingénieur hydraulique, gère une station de traitement de l'eau dans la banlieue de la ville. Un grave danger environnemental et sanitaire se présente lorsque l'eau d'une des cuves est contaminée par l'arsenic et une explosion provoque une rupture dans un des bassins de l'usine. Bien qu'ils ne soient jamais nommés explicitement [End Page 268] dans le roman, les responsables de ce sabotage sont clairement pointés du doigt par l'auteure: "Son usine [de Manoj] était devenue prospère, même si la concurrence avec les grands groupes internationaux et les nouveaux opérateurs locaux restait âpre. Tous s'affrontaient pour le contrôle de ce secteur" (51). La mainmise des grands groupes français sur le marché de l'eau, "water business, comme on l'appelait" (51) semble ferme. Ainsi, les effets néfastes du turbo-capitalisme qui affecte surtout les plus démunis dans les pays en voie de développement sont évoqués à travers cette "violence" cachée. Le texte est parsemé de références à d'autres catastrophes environnementales—par exemple celle de l'usine chimique Union Carbide à Bhopal en Inde—et aux conséquences nocives des changements climatiques sur le continent nordaméricain, tels les incendies qui ont ravagé des régions forestières en Californie. Finalement, Manoj a recours au "scribe"—son fils à Paris—pour faire une analyse mathématique de la situation. Les "réalités incomparables" (185) des deux villes, Paris et Calcutta, ne cessent de se superposer dans ce roman si riche en motifs fascinants. À titre d'exemple, lors du développement de la catastrophe à Calcutta, Chandra croise, dans les rues de Paris, des lycéens qui manifestent contre la dégradation de la planète, ainsi qu'un groupe de jeunes filles récoltant des signatures pour une cause humanitaire. Ce beau roman, écrit avec sensibilité et un sens de l'observation extraordinaire, témoigne d'un engagement écologique présenté avec pudeur. Vivan Steemers Western Michigan University Copyright © 2021 American Association of Teachers of French
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