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Avril et le monde truqué real. par Franck Ekinci, Christian Desmares

2017; American Association of Teachers of French; Volume: 90; Issue: 3 Linguagem: Francês

10.1353/tfr.2017.0319

2329-7131

Marion Geiger,

Diverse multidisciplinary academic research

Reviews 237 réalisateurs est certainement sa véritable force. Demain propose des modèles, attire un public varié, y compris des néophytes et des éco-sceptiques, fait débat, recrute des bricoleurs de la politique et de l’écologie. Après tout, Voltaire s’étudie encore après plus de deux siècles. Pourquoi alors un film ne chercherait-il pas à réveiller le Candide qui dort peut-être en chacun de nous? On y gagnerait probablement tous. Hamilton College (NY) Martine Guyot-Bender Ekinci, Franck, et Christian Desmares, réal. Avril et le monde truqué. Int. Marion Cotillard, Jean Rochefort, Olivier Gourmet. Je suis bien content, 2015. Ce film d’animation met en scène l’univers à la fois réaliste et onirique des bandes dessinées de Jacques Tardi dans le décor industriel parisien d’une Belle Époque et d’un début de vingtième siècle en déclin. L’intrigue commence en 1870 lorsque Gustave Franklin, scientifique au service de l’armée de Napoléon III, tente de découvrir un sérum d’invulnérabilité pour une utilisation militaire.Deux créatures métamorphosées s’échappent du laboratoire au cours d’une explosion. Le savant y périt en emportant son secret. Les décennies suivantes se déroulent sous les règnes fictifs de Napoléon IV et V. Elles sont marquées par la disparition mystérieuse d’autres scientifiques, entraînant l’arrêt de tout progrès technologique. Des sociétés restent figées dans l’ère des machines à vapeur et se disputent les ressources naturelles. L’arrière-petite-fille de Franklin, Avril, grandit dans un Paris gris, souillé de fumée de charbon, sans arbres, sans électricité. Ses parents, eux-mêmes scientifiques, disparaissent en 1931. La jeune Avril poursuit les recherches sur le sérum de son grand-père, avec comme seule famille et mentor Darwin, un chat doué de parole et grand humaniste. En 1941, celui-ci est mourant; in extremis, Avril réussit à créer le sérum qui sauve Darwin. Sa découverte attire l’attention de puissances restées dans l’ombre de l’histoire, tapies dans un sousmonde parasitaire du monde de la surface où évolue Avril: il est caché dans une immense forêt qui s’étend sous Paris. Là se trouve un laboratoire de recherche dirigé par les deux créatures transformées en animaux intelligents. Avril y retrouve ses parents et les autres scientifiques, qui, nolens volens, ont collaboré à un projet destiné à sauver “la vie”. Ils cherchent à envoyer dans l’espace des échantillons de plantes au moyen d’une fusée lunaire—la végétation survivra grâce au sérum d’invulnérabilité que vient de découvrir Avril. Quand cette dernière apporte la pièce manquante, le leader charismatique du projet, un varan nommé Rodrigue, révèle ses véritables intentions: animé par un esprit de vengeance, il veut détruire la terre et l’humanité, pour que seule la vie qui ait “de la valeur” survive sur une autre planète. Ce beau film continue de développer l’univers de prédilection de Tardi tout en rappelant, sans ordre particulier, Jules Verne, Frankenstein, les mondes post-apocalyptiques des studios Ghibli, jusqu’aux paranoïas urbaines de Fantômas et Métropolis, replacées dans un univers Steampunk parisien avec la poésie du Roi et l’oiseau. C’est un film de genre, mais un genre que l’équipe d’animation a fait sien en mettant l’accent sur l’imagination et l’invention visuelle—c’est au moyen de décors et de machines soigneusement recherchés,une palette de couleurs expertement composée et une bonne dose d’humour visuel que l’histoire de cette société en déclin se raconte. Cette uchronie magnifiquement peinte, avec une jeune héroïne forte et intelligente, des personnages attachants et une intrigue palpitante servira avantageusement de support à des discussions en classe sur le réalisme fantastique, les grandes peurs, l’écologie, la bioéthique et le bon usage des sciences et du progrès...