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De rouille et d’os by Jacques Audiard

2013; American Association of Teachers of French; Volume: 87; Issue: 1 Linguagem: Francês

10.1353/tfr.2013.0018

2329-7131

François Massonnat,

Cultural Insights and Digital Impacts

l’étranger ce que l’on a commencé à appliquer dans d’autres cours/disciplines, même si les auteurs de ces chapitres mettent en évidence que de nombreux enseignants de ces programmes résistent encore à la nouvelle pensée constructiviste en se basant sur des systèmes positivistes ou relativistes. Un premier élément essentiel de ces méthodes est que l’étudiant est le centre de l’enseignement; un deuxième est qu’il faut rendre l’étudiant interactif avec le sujet étudié, les autres étudiants et la communauté locale. En plus des sessions de pré-départ et de post-retour, il s’agit d’appliquer une pédagogie interventionniste ciblée. Ainsi les statistiques montrent clairement que la longueur d’un séjour n’est pas le critère essentiel de réussite: un séjour bref (3 semaines) bien organisé est plus efficace qu’un séjour long non accompagné par un guide culturel interventionniste. C’est seulement ainsi que l’étudiant[e] pourra alors vraiment acquérir des compétences interculturelles et passer des positions interculturelles faibles de“denial, defense, reversal, minimization”, à celles, recherchées, de l’acceptation de et l’adaptation à la culture de l’autre. University of Alberta (Canada) Chris Reyns-Chikuma Film edited by Michèle Bissière Audiard, Jacques, réal. De rouille et d’os. Int. Marion Cotillard, Matthias Schoenaerts, Armand Verdure, Céline Sallette, Corinne Masiero, Bouli Lanners. Why Not, 2012. Souvent chez Audiard, d’un univers de grisaille qu’on s’imagine volontiers réaliste, naît, à l’extrême limite du vraisemblable, la rédemption de personnages que la logique vouait au malheur. Ainsi dans De battre mon cœur s’est arrêté ancrait-il un jeune homme dans le quotidien sordide des promoteurs immobiliers, dont il s’échappait par la musique et la rencontre d’une jeune pianiste chinoise qu’il finissait par aimer. Dans Un prophète, de la représentation méticuleuse du monde carcéral germait l’histoire d’un jeune arabe illettré qui apprenait seul à parler corse, se faisait adopter par un parrain de l’Île de Beauté à la crinière blonde, et s’élevait finalement au firmament de la mafia arabo-musulmane. Dernier opus du réalisateur, De rouille et d’os n’échappe pas au modèle et fait jaillir l’improbable grâce d’un monde du sousprol étariat contemporain où l’on se nourrit de yaourts périmés invendus dans les supermarchés, où l’on se bat sauvagement à mains nues pour arrondir ses fins de mois, et où la solidarité de classe s’est délitée au point que c’est le pauvre lui-même qui s’avère désormais le pire ennemi du pauvre. Cette grâce, elle émerge de la rencontre d’un géant blond venu des Flandres curieusement prénommé Ali et de Marie, une soigneuse du Marineland d’Antibes amputée des deux jambes qu’un orque a mutilée lors d’un spectacle. Cette rencontre, amicale et chaste d’abord, confronte assez vite les 200 FRENCH REVIEW 87.1 Reviews 201 deux corps—celui d’Ali, massif et incarné, et celui de Marie, fragile et aliéné. La virilité assumée d’Ali a toutefois pour corollaire un handicap émotionnel, une incapacité à aimer jusqu’à son propre fils ou à envisager les femmes au-delà du plaisir charnel qu’il peut en tirer. Paradoxalement, ce détachement émotionnel qui fait de lui un improbable amoureux s’avère salvateur pour Marie: en la traitant comme n’importe quelle autre femme, c’est-à-dire comme un “coup” sans conséquence, il lui permet de se réapproprier son corps et de transcender son handicap. Si la rédemption corporelle de Marie arrive assez tôt, l’émotion rentrée du protagoniste mettra plus de temps à s’épanouir avant qu’un désastre ultime ne rende enfin possible un“je t’aime”sangloté. Fidèle à son équipe technique habituelle, Audiard filme au plus près des corps, à fleur de peaux sur lesquelles semble glisser la partition toujours élégante d’Alexandre Desplat.Marion Cotillard,aussi convaincante que l’impressionnant Mathieu...