Ô Besançon: une jeunesse 70 par Mustapha Kharmoudi
2011; American Association of Teachers of French; Volume: 85; Issue: 1 Linguagem: Francês
10.1353/tfr.2011.0117
ISSN2329-7131
Autores Tópico(s)Aging, Elder Care, and Social Issues
Resumol’aspect le plus intéressant de ce récit de voir un personnage public dans un siècle qui préfigure les Lumières, en lutte perpétuelle avec sa violence intérieure et son incapacité d’y résister. La liberté à laquelle elle semble vouloir accéder, dont elle sait qu’elle ne peut qu’être intérieure (pourvu qu’une solide rente lui permette de vivre dignement dans son siècle de luxe inouï), est finalement ce qui lui manque le plus, à tous les moments de son existence. L’échiquier dont il est question dans le titre de cet ouvrage est bien cette Europe où des nations se constituent contre d’autres, au gré de leurs alliances, avec au centre Rome et ses papes successifs en lutte contre l’importance à présent avérée de la religion de Calvin. Mais les rois et les fous de ce jeu d’échec évoluent également sur le territoire fort inquiétant de l’imagination violente d’une Reine qui, ce n’est pas un hasard, a fasciné Alexandre Dumas et a été incarnée au cinéma par Greta Garbo. Alliance Française de Denver (CO) Jean-François Duclos KHARMOUDI, MUSTAPHA. Ô Besançon: une jeunesse 70. Paris: L’Harmattan, 2009. ISBN 978-2-296-09227-3. Pp. 237. 22 a. Voici comment Mustapha Kharmoudi interpelle le lecteur dès l’incipit pour susciter sa curiosité: Avant tout, sache que j’ai atterri à Besançon par choix, contrairement à la plupart de mes copains de l’époque. C’était au début des années soixante-dix. Eux se retrouvaient au hasard d’un contrat ou d’une bourse, qui chez Peugeot, qui ouvrier agricole, qui encore étudiant. Moi je savais depuis longtemps, depuis très longtemps, que j’allais venir à Besançon et nulle part ailleurs. (7) Il poursuit en donnant libre cours à son désir de se remémorer de lointains souvenirs qui célèbrent sa ville et son pays, souvenirs tatoués dans sa mémoire. En effet, depuis sa rencontre avec une maîtresse d’école française, à l’âge de huit ou neuf ans à Benahmed, petite bourgade perdue dans l’arrière-pays de Casablanca, le narrateur a caressé le rêve de se rendre à Besançon et d’y vivre. Quarante ans plus tard, il revient sur son parcours de jeune étudiant chassé du Maroc et sur son exil dans cette ville qui l’habitait au plus profond de son être. Il évoque sa fuite d’un pays opprimé par un régime dictatorial, où son soutien pour le coup d’état militaire raté de 1971 lui a valu d’être chassé par les gendarmes et de devoir partir précipitamment pour la France. Il aborde avec une extrême sensibilité son arrivée dans cette ville, à l’aube des années 70, ainsi que les sentiments profonds et uniques qu’il a éprouvés en la découvrant pour la première fois: C’est en fin de journée que je suis arrivé à Besançon. Je me souviens encore de ce choc inqualifiable. Je tremblais de peur et de joie. Cette intense émotion, je ne pense pas l’avoir éprouvée à un autre moment de ma vie, ni avant ni après. [...] Et pour ne rien te cacher, c’était même nettement plus fort que la première fois où j’avais fait l’amour. (16) Le témoignage qu’il offre à propos de ses difficultés et de ses découvertes est extrêmement touchant. C’est que, très vite, il apprend que tout est différent, tant sur le plan climatique que relationnel et humain. Il tente ainsi de réussir, coûte que coûte, sa nouvelle vie et de s’intégrer en s’habituant à tout, même au pire. Et 218 FRENCH REVIEW 85.1 comme la période de son installation est juste après les événements de mai 68, il est aussitôt pris dans le tourbillon d’une jeunesse assoiffée de liberté et en particulier de liberté sexuelle. Ceci dit, il livre un regard captivant sur ses rencontres, ses...
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