Artigo Revisado por pares

L'homme qui pleure de rire par Frédéric Beigbeder

2021; American Association of Teachers of French; Volume: 95; Issue: 1 Linguagem: Francês

10.1353/tfr.2021.0239

ISSN

2329-7131

Autores

Michel Gueldry,

Tópico(s)

Diverse multidisciplinary academic research

Resumo

Reviewed by: L'homme qui pleure de rire par Frédéric Beigbeder Michel Gueldry Beigbeder, Frédéric. L'homme qui pleure de rire. Grasset, 2020. ISBN 978-2-246-81923-3. Pp. 320. Avec Michel Houellebecq, Beigbeder est un des romanciers du cynisme contemporain, de la débauche provocatrice, de la décadence d'une certaine France "en perte de repères" (163). Le personnage central, Octave Parango, "soixante-quatorze ans [End Page 242] dans vingt ans" (15), est un mélange de Marc Marronnier (avatar jouisseur de l'auteur dans sa première trilogie de jeunesse) et du romancier désormais dans son âge mûr, et inquiet. Il figure déjà dans 99 francs (2000) et Au secours pardon (2007), dans une seconde trilogie. Comme eux, il est buveur, drogué, noctambule, "sex addict" (129), narcissiste infantile, et autodestructeur. Beigbeder pousse l'autofiction par ce mélange décapant d'autobiographie, de provocation, de remords roué, de satire sociale, de chronique cynique du siècle, et de mise en abyme répétée. L'action principale (maigre) est fournie par une nuit de déambulations fiévreuses entre l'Arc de Triomphe et la Madeleine, qui alternent avec ses souvenirs nostalgiques d'une jeunesse dissolue et ses obsessions banales (argent, sexe, ambition, vieillissement). En arrière-plan de cette futilité, les "rebelles vêtus de gilets fluorescents" (27) se battent, eux, pour la vraie vie—en vain dans la Macronie. La nostalgie de l'argent facile et des excès des années 1980–1990 fait contraste avec les difficultés actuelles et avec les réseaux sociaux où beaucoup posent et se vendent constamment. Beigbeder grenouille au carrefour des nuits illicites, de l'"élite déconnectée" (104), des médias, de la com', et du monde littéraire. Comme dans ses autres romans, il brosse un portrait féroce de ces marécages, du parisianisme, des anglicismes et people à la mode, et des techniques de manipulation. Le langage aussi est corrompu: il faut "buzzer" pour être MDR ou PTDR (37) et son roman dégénère en émoticônes (291–93). En effet, le dandy égotiste d'hier est désormais un quinquagénaire inquiet pour la démocratie et la France. Le rire qui parcourt cette anomie générale est cruel, vide, nihiliste; il est "un spectacle de marionnettes" (61) détruisant l'esprit public. La "population devient folle de fadaises" (61) et la res publica "une pantalonnade permanente" (51). Les "gens de la com" sont "des collabos de l'Empire du Rien" (70). L'absurde sur Twitter attise le "comico-populisme" (62), Donald Trump, Boris Johnson et autres "clowns maléfiques" (64) issus de la télévision. Beigbeder polit son image d'anar de droite, de dandy irresponsable, de "pervers narcissique" (48) bien nanti, "de branleur"—il est aussi est un "hypercondriaque" héritier des décadents (201–02). Le romancier et son trouble avatar développent une conscience de la vie saine et stable (genre white picket fence) en fin de récit, et Beigbeder révèle ce qu'il pourrait autrement être quand il survole "l'humour engagé" (112) ou le rire critique et libérateur du Nom de la rose d'Umberto Eco (123). Il a le sens de la formule et des mélanges hétéroclites, du profond au grotesque, des people à la littérature, de Voici à Victor Hugo. Il mêle musiques, politiciens, artistes, flambeurs, et "fake news" (57), la fiction et la sociologie, le matérialisme nihiliste et la sagesse impossible d'une ombre parmi les ombres. [End Page 243] Michel Gueldry Missouri University of Science and Technology Copyright © 2021 American Association of Teachers of French

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