Artigo Acesso aberto

« Les Revenants », suivi de « Quatre notes sur la fiction de soi »

2012; Ghent University; Issue: 4 Linguagem: Francês

10.4000/fixxion.6553

ISSN

2295-9106

Autores

Philippe Forest,

Tópico(s)

Historical and Literary Analyses

Resumo

suivi de « Quatre notes sur la fiction de soi » Philippe ForestLorsqu'il m'arrivait -comme cette fois -de passer quelques jours à Paris, je réservais toujours une chambre dans le même petit hôtel derrière Montparnasse.Je l'avais choisi parce qu'il se situait juste en face de l'immeuble où nous avions autrefois habité -tous les trois -, en cet endroit très précis où sort de la chaussée la longue ligne aérienne du métro filant jusqu'au Trocadéro et vers les beaux quartiers de la capitale.Je connaissais ce fantasme courant qui pousse certaines personnes à prétexter un voyage d'affaires, un déplacement temporaire et à s'installer dans la clandestinité provisoire d'un nouveau logement à quelques pas de leur domicile.On versait le plus souvent ces histoires au compte de la jalousie la plus banale : vaudevilles, histoires d'adultère, et toutes les variantes pensables de la frénésie conjugale.Mais tout était souvent beaucoup plus simple.Un homme s'absentait simplement du monde et son regard s'attachait -soudainement, inexplicablement -à cette place vide qu'il avait laissée.Une inconsolable soif de savoir le poussait irrésistiblement vers sa vie, une sorte de grande curiosité désintéressée qui exigeait afin d'être satisfaite qu'il disparaisse à son tour.Là, pas là, ici, ailleurs, autre part, nulle part : finalement, il n'y avait pas de vraie différence.On pouvait pousser la porte et rien ne se passait.Le monde s'accommodait de tout et, une fois accomplis les modestes ajustements rendus nécessaires par la situation, l'équilibre primitif des choses se rétablissait aussitôt de luimême.Personne ne s'imaginait réellement, bien sûr, qu'il y eût de l'autre côté quelque chose à découvrir (de meilleur, de plus exaltant, d'inconnu) mais c'était le simple geste de pousser la porte qui se transformait soudain en un prodige presque hypnotique : le stupéfiant spectacle de voir ainsi tout s'effacer et pour rien.D'un homme qui disparaît, on dit qu'il s'évanouit.Mais "s'évanouir" signifie : "perdre conscience" aussi bien que "s'en aller".Disparaître voulait dire alors : vouer toutes choses au vertige calme de n'être plus rien.Le phénomène était banal mais depuis quelque temps il suscitait une grande curiosité : comme si la société s'était tout à coup inquiétée de cette espèce d'étrange et

Referência(s)