LETTRES DE SOULEYMANE KANTÈ ET MAURICE HOUIS
2001; Indiana University Press; Volume: 3; Issue: 1 Linguagem: Francês
10.2979/mnd.2001.a873357
ISSN2379-5506
Autores Tópico(s)Historical Linguistics and Language Studies
ResumoLETTRES DE SOULEYMANE KANTÈ ET MAURICE HOUIS Edités par Valentin Vydrine Introduction La correspondence entre Souleymane Kantè, le fondateur du Nko, et Maurice Houis, un mandéisant célèbre de la « génération aînée », permet mieux comprendre l'histoire du Nko et la biographie scientifique de son fondateur. Les trois lettres ont été gardées et gentiment mises à ma disposition par Gérard Dumestre. Leur lecture mène à la conclusion qu'il y avaient d'autres lettres (du moins, une autre lettre de Houis à Kantè, se datant de 26 Juillet 1965). Malheureusement, nous ne savons pas jusqu'à quand cette correspondence s'est continuée. La première lettre de Souleymane Kantè et la lettre de Maurice Houis sont écrites à la machine; la deuxième lettre de Kantè est écrite à la main. Dans cette publication j'ai décidé de maintenir la mise en page, l'orthographe et la ponctuation des lettres, sans corriger des fautes. Qu'on n'y voit pas l'intention de ridiculiser Soulaymane Kantè: par contre, nous devons apprécier sa capacité admirable de s'exprimer clairement et d'une façon tout à fait compréhensible (malgré toutes les fautes) dans une langue qu'il n'avait appris qu'à l'âge adulte. De l'autre côté, ses lettres représentent un échantillon intéressant de texte en français beaucoup influencé par les normes littéraires arabes (héritées également par le Nko): l'emploi peu réglementé des points, des virgules et des points-virgules; parenthèses au heu de commas; les minuscules au lieu de majuscules. . . Cette correspondence est un témoignage de l'influence de la tradition linguistique occidentale sur les idées linguistiques du fondateur du Nko. Dans sa première lettre (tout comme dans les premiers syllabaires Nko), Souleymane Kantè parle de la tonalité dans les termes des « mots terrestres » (pour les mots à ton ascendant/bas) et « mots célestes » (pour les mots à ton haut), tandis que dans les publications plus récentes, le phénomène du ton (kán hake) est présenté séparément de la base segmentale, donc en tant qu'une prosodème. Il est fort probable que la lettre de Maurice Houis a amené Kantè à changer son interpretation. Le texte de Houis, à son tour, revèle une étape initiale de l'étude du système tonal du maninka, avant la découverte de l'article tonal.1 D'où des erreurs de notation de tons; par exemple, fã 'père' est interprété par Houis comme un mot à ton haut, - ce qui s'explique par le fait que fã appartient en maninka à la classe des lexemes (les parents aînés) qui ne reçoivent pas d'article tonal, et dont le ton se réalise dans l'isolation comme bas uni, au heu d'ascendant. Par consequence, ťáK 'folie' a été interprété comme fàá- parce que, d'après l'analyse préliminaire de Houis, la place du mot à ton haut avait été Mande Studies 3 (2001) pp. 133-146 134 Valentin Vydrine occupée par fi 'père'. La notation des t exacte. Les idées de Souleymane Kantè sur la phonologie et la grammaire maninka exposées dans ses lettres sont connues de ses livres, mais pour ceux qui ne savent pas lire le maninka en Nko, la publication de ces textes écrits par lui-même en fiançais peut être révélatrice. Et dans tous les cas, la correspondence de deux grands hommes de linguistique mandé, l'un représentant la tradition occidentale, et l'autre la tradition autochtone, est instructive comme le cas de contact bienveillant et mutuellement enrichissant de deux cultures scientifiques, jusque là indépendantes l'une de l'autre. Notes 1 Voir la communication de Charles Bird au 5' Congrès de l'Association ouest-africaine de linguistique en Accra en 1965; cf. également William Weimers, 1949; cette dernière communication était restée, apparemment inconnue de Houis. Références Charles Bird, 1965. "Bambara Tone and the Specific Marker." Communication présentée au 5e Congrès de l'Association ouest-africaine de linguistique, Accra, Ghana...
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