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Traitement de la variation diatopique chez trois grammairiens belges : des chroniques du père Deharveng (1922-1928) à celles de Grevisse (1955-1970) et de Goosse (1966-1990)

2024; OpenEdition Journals; Volume: 87; Linguagem: Francês

10.4000/12zrh

2118-9692

Michel Berré, Élisabeth Castadot, Bénédicte Van Gysel,

Spanish Linguistics and Language Studies

Les francophones de Belgique ont l’habitude de trouver, dans leurs journaux ou magazines, des chroniques consacrées à des questions de langage, le plus souvent des mots ou des expressions considérés comme des exemples de variations diatopiques, qualifiés de « belgicismes ». Les textes produits par trois de ces chroniqueurs – Deharveng (°1867 †1929), Grevisse (°1895 †1980) et Goosse (°1926 †2019) – forment un corpus encore peu étudié, dans lequel s’exprime cependant une tension fondamentale par rapport à ces manifestations de variations diatopiques : d’une part, ils poursuivent une certaine idéologie des remarqueurs des siècles passés, reposant sur une hiérarchie des usages et faisant écho à la distinction langagière recherchée par leur lectorat ; d’autre part, ils ont le souci scientifique mais aussi didactique de ne pas condamner sans examen approfondi une forme ou une tournure qualifiée de « belgicisme ». Les arguments (statistique, systémique, prescriptif, étymologique…) convoqués par de tels examens, véritables instructions à charge et à décharge, explorent, au-delà de l’inscription dans chaque époque, la relation prescriptif-descriptif. Ce faisant, les trois grammairiens-chroniqueurs partagent avec leur lecteur une réelle réflexion sur la norme, l’autorité linguistique et le « purisme » – étiquette qu’ils rejettent avec force, en s’opposant unanimement à une « grammaire de droit divin » ou au « magister dixit ». Au-delà d’une filiation revendiquée, ils manifestent dans leurs chroniques une ouverture toujours plus grande à la variation, fondée sur la conviction que « la langue est perpétuellement en mouvement » (Goosse, 1999).